Mémoires de la Commune de Pruniers-en-Sologne
La volonté d'écrire la mémoire de la commune a pris naissance après que Maurice GAULTIER ait transmis à Michèle HENAULT, Maire-Adjoint de Pruniers, directrice du Service Infirmier à Domicile (S.I.A.D.) de Romorantin avec qui il était en relation professionnelle à cause de la maladie de son épouse. Monsieur GAULTIER tient à rendre hommage à Michèle HENNAULT pour son dévouement et la remercie du soutien et de l'aide qu'elle lui a apporté avec toute l'équipe exemplaire du S.I.A.D. lors des moments difficiles qu'il a vécu.
Après avoir pris connaissance du manuscrit de Maurice GAULTIER "Votre Pruniers en 1934", dont le récit est tapé ci-dessous, des prunellois se sont réunis autour de lui pour faire connaître la vie à Pruniers au temps de leur enfance. Il n'est pas question d'écrire l'histoire de la commune mais seulement rapporter des témoignages et anecdotes vécues à partir des années 1930. Ce travail de mémoire représente les souvenirs des prunellois et d'amis voisins qui ont connu cette époque, à savoir:
Rose-Anne LELOUP, épouse MALLIET
Lucien BOULEAU
Lucien CARRE
Maxime CHEVY
Maurice GAULTIER
Pierre GERMAIN
Jean MORLON
Roger LAMBERT
Jean-Marie BISSON
Henri CLOAREC
Votre Pruniers en 1934 Mes parents, à leur mariage, sont venus habiter dans votre gentille commune, une vieille maison aux murs noircis en face de l'actuelle salle des fêtes. Ensuite ils ont emménagé dans la maison qui fait le coin de la rue Abel Boissay et de la rue du Lieutenant Colonel Mailfert. Dans la cour il y avait un portique fabriqué par le menuisier, avec trapèze, anneaux, corde lisse, à noeuds, ainsi qu'une balançoire. Mes copains étaient nombreux à s'amuser dans la cour. Pour commencer,
voici la liste des commerçants et artisans. Deux
épiciers, LEGENDRE, à l'entrée de la rue du Grand
Village ; l'autre, BONSIGNE, en face de la boulangerie
qui était tenue par ARDON. Une charcuterie et
café-billard à la place de la mairie tenue par CARRE,
toujours souriant. Un autre café se situait où est
actuellement le Petit Chesnay. Il faisait tabac et
billard. Le patron était POUPARDIN. Un forgeron, THOMAS.
Un menuisier, BOITIER, était rue du Grand Village. Il
fabriquait des cercueils. Le café PLAT du Chalet, le
café des Brusolles, le café des Quatre Roues tenu par
une chinoise venue en 1917 avec les américains, le café
de Château Margot, dans une baraque de l'armée... Mais
la liste ne serait pas complète si l'on n'y ajoutait pas
deux autres cafés qui, bien que sur le territoire de
Gièvres, étaient aussi fréquentés par les Prunellois
: le Café des Glycines au Chêne Raboteux et
naturellement le Café-Restaurant du Chalet. Face à la base
aérienne, le garage BASTIE et ensuite SEGRET. Une petite
ferme, MESTRE, se situait à l'emplacement de la
pharmacie actuelle. Il y avait quelques vaches laitières qui fournissaient à pas mal de villageois un lait excellent. Les plus grandes fermes se situaient autour de la Maison Blanche, des chatelains des Thivault et de Chêne Moreau, ainsi que d'autres plus petites comme les FOLTIER, LEROY et autres. Il y avait à cette époque beaucoup de métayers. La mairie se
situait à l'ancienne école des garçons, sur la place
de l'église. L'école des filles était route de Gy, à
la place du centre de loisirs. Les instituteurs
s'appelaient tous les deux Roland SIMON. Dans la petite
classe, un SIMON nous enseignait le solfège, nous
faisait jouer du pipeau et jouait du violon en nous
accompagnant en chantant. A la fin de l'année scolaire
il y avait la photo de groupe et une très belle
distribution de très beaux livres de prix aux reliures
rouge et or. Cette remise de prix se faisait sous les
préaux. Le matin et le soir, c'était le défilé des
voitures à cheval, des Thivaults au Chêne Moreau, en
même temps que de nombreuses fermes, on amenait les
enfants de l'école ou on les ramenait. Il n'était pas
rare, en ce temps là, que les élèves fassent deux à
trois kilomètres aller et retour, chaussés de galoches.
Il y avait un élève nommé LEBERT qui imposait sa loi
à tout le monde. Nos instituteurs n'en savaient rien.
Mais, un jour, avec deux copains, nous lui avons flanqué
une vraie raclée sur le montant d'un pylone électrique
qui se trouvait en face de la maison de la famille
DOUCERON. Depuis ce jour, nous étions devenus les trois
héros de la classe. Le principal
employeur était l'entrepot de l'armée de l'air. Il y avait
trois fêtes foraines par an. Une sur la place de
l'église (la Saint-Jean ou
"Louée" en juin), une du
côté gauche du restaurant Le Chesnay (la
Saint-Michel en septembre), la
dernière au Chalet. Il y avait la baraque de tir avec
confiseries. Un manège pour enfants qui était entrainé
par un petit cheval, qui, un jour, en s'emballant, a
déséquilibré le plateau, à la grande peur des mamans
et des petits. Une année, il y eut la venue d'un nouveau
manège de Gièvres, cette fois-ci mécanique, le Lin
Wood. Le moulin des Quatre Roues fournissait et fournit encore de nombreux boulangers de la région. On voyait passer un gros camion Latil sur chassis haut avec un impressionnant moteur de 1m50 de long avec aires d'aération sur les côtés. Ce camion avait servi aux maquisards qui avaient peint le nom de leur unité : Charlot Ferlampin. Un matin, un bruit bizarre venant du ciel fit sortir les habitants du village. C'était le passage en plusieurs fois d'un Autogyre, précurseur de l'hélicoptère, qui allait à la base aérienne. Les anciens disaient avec surprise dans leur patois :"Ce que c'est dont que s'taffée là ? Mon enfance, en 1934, a été le point de départ, comme tout le monde, d'une vie de joies et de peines. Maurice GAULTIER |
Scolarité
Les
commentaires et photographies ci-dessous, sont le fruit des
réunions des anciens de la commune
Les photographies ci-dessous nous montrent l'importance que revêtait la fin de l'année scolaire. Tout d'abord par la remise des prix, par les photographies de fin de cycle scolaire et la distribution de superbes livres à couverture rouge avec la tranche des pages dorées.
Cette photographie de fin d'année scolaire met en avant le thème de la marine avec tous les petits mousses et le capitaine, barbu, pour asseoir son autorité. Le capitaine s'appelait Roger COUSIN. Sur cette photgraphie il avait 16 ans, le déguisement le vieillit !!! Il n'appartenait pas à cette classe, il était venu exprès, déguisé, pour représenter un capitaine pour la photographie.
1934
Les écoles de Pruniers étaient dans le bourg à l'emplacement de l'actuel centre de loisirs pour l'école des filles et dans les locaux de l'actuel salle informatique-centre adolescents pour les garçons. Il existait également une école à la Miltière. Les enfants les plus éloignés faisaient tous les jours, avec leurs galoches en bois, plus de six kilomètres aller et retour. Ainsi, le jeune Serge BARBOUX de la Gastière, en passant aux Quatre Roues, retrouvait Bernard GAULIER et ils continuaient ensemble sur le chemin de l'école.
Les
commerçants
Textes extraits
du bulletin de l'an 2000
Les
six cafés
Jusqu'aux
années qui suivirent la dernière guerre, Pruniers comptait six
cafés, alors qu'il n'en compte plus que deux aujourd'hui. Le
Petit Chesnaie était alors le Café POUPARDIN. Il faisait à la
fois café, restaurant, cinéma, coiffeur et sabotier. Et il
louait même des chambres.
Le Café de la poste situé à l'angle des rues Mailfert et
Clémenceau s'est appelé plus tard La Petite Raboliote. Monsieur
POIDRAS lui a donné ce nom en 1979. Il s'appelle maintenant Le
Prunellois.
Là où depuis 1964 se dresse la mairie se trouvait le café et
la charcuterie Carré, qui s'installa plus tard au presbytère,
ainsi qu'un café dont l'enseigne, en dépit de plusieurs
propriétaires successifs, porta longtemps le nom de Café
GOURDET Débitant. Au bout de la route des Bruzolles se tenait le
Café de l'Aviation où on vendait le journal "Le
Matin". Il y avait un café aux Quatre Roues et le sixième,
L'Estanquet, était à la Sablière. Mais la liste ne serait pas
complète si l'on n'y ajoutait pas deux autres cafés qui, bien
que sur le territoire de Gièvres, étaient aussi fréquentés
par les Prunellois : le Café des Glycines au Chêne Raboteux et
naturellement le Café-Restaurant du Chalet.
Les
trois épiceries
Aujourd'hui
la seule épicerie existante a pour enseigne Au Panier Sympa.
Autrefois, c'était tout simplement l'épicerie alimentation
qu'ont tenue successivement madame LEROY, madame LEGENDRE, madame
AYRALD, madame PLAT, madame GUIGNEDOUX, madame RICHARD et madame
BLANCHARD. Mais à cette époque, il y avait deux autres magasins
du même genre. L'un se trouvait face à l'actuelle boulangerie
et il était tenu par madame BONSIGNE et l'autre, dans la rue
Georges Clémenceau, par madame LEGER.
L'alambic
de monsieur BERNIER
Monsieur
Bernier était bouilleur de cru. Il assurait également, de
façon officieuse, les fonctions de passeur quand la Sauldre
était en crue. Ils faisait passer les gens qui allaient à la
gare ou qui en revenaient à bord de sa charette tirée par son
cheval. Autrefois les crues de la Sauldre étaient fréquentes.
Des anciens se souviennent encore de l'époque où, avant que des
aménagements de la Sauldre aient été entrepris, que l'eau
venait jusqu'au mur de l'école des garçons, actuellement salle
informatique et centre adolescents. L'alambic du village se
trouvait derrière l'église. Quand monsieur BERNIER décéda on
transporta l'alambic au pied du pont, sur la rive droite de la
rivière et la commune construisit à la place devenue libre un
garage destiné à remiser la voiture de monsieur SIMON,
instituteur, et le corbillard municipal que conduisait monsieur
MORLON, maçon de son métier et croque-mort à l'occasion. Un
jour, monsieur MORLON trouva un marcassin dont les parents
avaient été victimes de la chasse. Il l'éleva au biberon et,
comme c'était une femelle, il l'appela DOLY CLOCLO. L'animal
devint familier au point de prendre peu à peu l'habitude de
suivre son maître comme l'aurait fait un jeune chien. Et
bientôt on vit le marcassin, devenu sanglier, traverser le
bourg, accroché aux basques de son maître qui avait coutume de
rencontrer sa clientèle dans les cafés de Pruniers. En
grandissant, le gentil sanglier retrouva ses instincts de bête
sauvage et monsieur MORLON dut malheureusement s'en séparer.
La
chemiserie
A
cette époque déjà, peut être dégoûtés par le rythme de vie
qu'on menait dans la capitale ou probablement découragés par le
montant des salaires qu'il fallait verser chaque mois (ou
pour les deux motifs à la fois), monsieur
et madame Jean SIMON avaient pratiqué la délocalisation de leur
entreprise en la transférant à Pruniers. C'était une
chemiserie. Elle était installée dans l'ancienne cure
abandonnée par le curé qui résidait à Gièvres. Elle
correspondait au n°35 actuel de la rue Georges Clémenceau.
Cette chemiserie employa une douzaine d'ouvrières jusqu'en 1958,
date à laquelle un repreneur transféra l'atelier à Romorantin.
Le
charron
Monsieur
Marcel DUCHET fut le dernier charron de Pruniers. Il avait son
atelier au début de la route de Lassay. Monsieur DUCHET partit
à la guerre. Il fut prisonnier et à son retour de captivité,
il reprit son métier. Il était aussi menuisier. Sa maison et
son atelier servent aujourd'hui au centre de loisirs.
Les
forgerons
Il y
avait deux forgerons qui exerçaient tous deux la maréchalerie.
L'un avait son atelier dans celui qu'occupait monsieur Emile
CARRE, serrurier, au n°180 de la rue du Lieutenant Colonel
MAILFERTet l'autre avait sa forge dans la rue georges
Clémenceau. Ils ferraient les chevaux sur le pas de leur porte.
Il s'envolait une odeur de corne brûlée qui montait en volutes
quand ils appliquaient le fer rougi sur les sabots.
Anecdotes
d'antan
Textes extraits
du bulletin de l'an 2000
La
ferme et les jardins
A
l'angle de la rue qui conduit à Lassay, sur le côté droit, se
dressait autrefois la maison de madame Céline ROUZEAU. Et là
où se trouvent aujourd'hui le cabinet d'assurances, la poste et
la pharmacie, il y avait alors une ferme avec ses bâtiments et
sa cour. Elle appartenait à monsieur BARBE qui la louait à
monsieur Gaston MESTRE. Celui-ci cultivait, à l'aide d'un
cheval, des terres très ondulées sur lesquelles ont été
bâtis, par la suite, la salle des fêtes Alain Fournier et son
parking. Chaque année après les moissons, une grande batteuse,
comme on en voit aujourd'hui dans les musées, s'installait dans
la cour de la ferme. Jadis animée par un cheval, puis par une
machine à vapeur et plus tard par une courroie de tracteur,
cette machine constituait pour les enfants un spectacle de choix
dont beaucoup se rappellent encore les bruits de mécanique bien
huilée et les parfums si caractéristiques de la campagne
d'autrefois.
Derrière cette ferme et partout alentour s'étendaient des
jardins, notamment là où ont été construits l'école
maternelle et son parking. L'un d'eux était cultivé par
monsieur LEROY, dont l'épouse était épicière. Un jour,
monsieur LEROY semait des haricots. Comme il est normal de
procéder en pareille circonstance, il traça d'abord des sillons
bien droits et parallèles ensuite, le dos courbé, et le regard
posé sur son travail. Il se mit à semer en progressant en
marche arrière. Dans le jardin d'à côté se trouvait à ce
moment le menuisier monsieur LAMBERT. Soudain, celui-ci entendit
un tintamarre que ponctua finalement un grand plouf
! C'était
monsieur LEROY qui, absorbé, par sa tâche, venait de tomber
dans son puits en cognant, fort heureusement, le seau qui fit
office d'alarme et c'est ainsi qu'il fut sauvé d'une mort
certaine par son voisin.
Le
curé
Pendant
la dernière guerre, même les curés furent mobilisés. Il en
résulta que le curé de Pruniers fut appelé sous les drapeaux.
Il eut pour remplaçant le curé de Gy qui dut exercer son
sacerdoce dans de nombreuses paroisses. Monsieur le curé Hibry,
pour les besoins de ses fonctions itinérantes, utilisait une
petite automobile à trois roues. Pendant qu'il officiait ou
qu'il faisait le catéchisme, elle était stationnée devant
l'église, dans le chemin qui descend en pente douce vers le
lavoir. Un jour, plusieurs garnements desserrèrent le frein à
main de l'auto qui cessa de rester immobile. Elle se mit à
rouler, rouler de plus en plus vite tant et si bien qu'elle finit
sa course dans la Sauldre. Les enfants ne trouvèrent rien de
mieux que de lester, à l'aide de pierres, le véhicule à
demi-immergé.
Période
de guerre 1939-1945
Les
commentaires et photographies ci-dessous, sont le fruit des
réunions des anciens de la commune
Le
hangar
En
1939, à la déclaration de la guerre, il existait un hangar à
la Petite Gastière qui avait servi à stocker des pièces
détachées d'avions de la guerre 14-18. Ce bâtiment a aussi
été utilisé pour rassembler les insoumis, ou objecteurs de
conscience. Ils couchaient sur de la paille. Monsieur Cloarec
déclare avoir lu dans les archives de Pruniers que ce hangar fut
financé par Romorantin pour le développement de l'aviation.
Cet hangar
nous parle : "Eh
oui, c'est bien moi, le hangar ! J'ai été construit bien avant
la guerre de 14 et j'ai abrité les avions VOISIN et autres. J'ai
vu les américains. J'avais un concierge qui s'appelait PIEDNOIR.
A la déclaration de guerre en 1939, j'ai abrité les insoumis de
l'armée que l'on appelait les "JOYEUX". J'ai vu les
Allemands faire des manoeuvres autour de moi. J'ai vu un couple
avec deux enfants réfugiés dans la maison près de moi manquer
de se faire fusiller par les Allemands attaqués par les
maquisards. Le père, parlant un peu l'allemand car il avait
été prisonnier de guerre en 1914, a sauvé sa famille. Ensuite,
je fus délaissé. Comme visite, j'avais le couple qui venait
entretenir leur jardin. J'étais bien seul mais un jour j'ai vu
arriver une horde de gros engins qui m'ont entièrement
démonté. Je me suis dit : où vais-je aller ? J'ai eu peur
d'aller à la feraille !!! Eh bien non, me voilà arrivé au sud
de la base aérienne et l'on me remonte. J'étais le seul et
très content car j'abritais de nouveau des avions. Aujourd'hui
la vie autour de moi est très active et je peux finir mes jours
bien entouré. Merci !!!"
Texte de Maurice GAULTIER
L'exode
Durant
l'exode, il y avait des voitures abandonnées, faute d'essence,
un peu partout. En 1940, on rencontrait à Pruniers nombre de
familles de l'Oise, de la Somme, de Belgique. Ce n'était pas la
première fois que l'on rencontrait des réfugiés à Pruniers
car avant, en 1936, on avait vu des espagnols. Un jeune, issu de
l'exode de 1940, a été pris à la charcuterie CARRE pour
travailler en tant qu'apprenti.
Les
réquisitions
En
1939, au début de la guerre, on récupéra la feraille des
habitants de Pruniers. Elle était entassée près de l'église,
à côté du corbillard pour faire de l'"acier
victorieux". Le tas était très haut. A la déclaration de
la guerre, les chevaux furent réquisitionnés et rassemblés à
la gare de Romorantin. A la libération, un prunellois a
récupéré un cheval de l'armée canadienne.
Les armes devaient être remises en mairie mais certains
habitants de Pruniers les cachèrent, bien souvent enterrées
dans le jardin après les avoir enveloppées de journaux ou
chiffons bien huilés afin de les récupérer plus tard en bon
état. Les armes étaient aussi déposées dans les villages,
dans les mairies ou dans les sous-préfectures, par les soldats
français en déroute. Beaucoup de soldats ne déposèrent pas
les armes mais passèrent de l'autre côté du Cher, qui
délimitèrent un peu plus tard les zones libres et occupées.
Les allemands, dès leur arrivée, détruisirent les armes
toujours stockées. Proche de la maison des associations
actuelle, le grenier d'une maison appartenant au père de Lucien
CARRE contenait un tas d'armes cassés par l'armée française en
débacle. Les allemands ont failli fusiller le père de Lucien à
la découverte de ce stock.
Les bâtiments communaux, comme les écoles, furent
réquisitionnés ainsi que des chambres chez des particuliers
prunellois. Les écoles prunelloises, réquisitionnées, furent
remplacées par des pièces vacantes chez des particuliers.
Notamment rue du Stade et dans trois maisons en face du
restaurant actuel de monsieur FARRADECHE, le petit Chesnaie.
Une des demoiselles CLEMENT, celle qui s'appelait Margueritte, et
les frères SIMON faisaient la classe. Devant l'école, une
station d'épuration a été construite par les allemands. Elle
n'a jamais fonctionné.
Les allemands avaient un grand besoin d'hébergement à cause de
la proximité du camp de Pruniers où de nombreux militaires
étaient basés. Deux baraques en bois, érigées en centre bourg
à l'emplacement de l'école maternelle actuelle, servaient de
dortoir avec un couloir central et des chambres de parts et
d'autres. Des "roulantes" étaient installées dans la
cour de l'école des filles pour préparer les repas des
allemands.
Les hommes et les jeunes gens de plus de 16 ans furent
réquisitionnés de force pour surveiller, la nuit, les lignes
électriques, les voies ferrées, etc... enfin tous les points
sensibles, afin d'éviter les sabotages par le maquis. Les
réquisitionnés étaient armés de bâtons. Pour pouvoir
circuler, ils avaient des "aussweiss", ou
laisser-passer qu'ils devaient présenter à toute demande de
l'occupant. Lucien BOULEAU se souvient que son père Maurice
participait, comme réquisitionné de force, à la surveillance
de la ligne de chemin de fer Tours-Vierzon. Le chef de son
équipe, réquisitionné lui aussi, lui avait donné pour
consigne de ne rien dire aux allemands concernant d'éventuels
maquisards rencontrés. Tous les prunellois de 20 à 60 ans
étaient réquisitionnés pour la surveillance. Maurice GAULTIER
se souvient que Londres avait averti l'aviation de ne pas
bombarder les lignes électriques pour, qu'à la libération, la
France ait le maximum de puissance sur ses lignes.
Des prunellois sont partis au Service de Travail obligatoire, en
Allemagne, à l'âge de 17 ans.
Les allemands réquisitionnaient aussi les gens de Pruniers pour
aller faucher les pistes de la base et reboucher les trous de
bombe, ou ramasser des pommes de terre pour les cuisiniers de la
base.
Aménagements
divers
Une
passerelle au-dessus de la Sauldre était érigée à la hauteur
du château d'eau militaire, afin de permettre aux militaires
allemands de pourvoir très rapidement se disperser dans la
campagne en cas d'attaque aérienne anglaise ou américaine.
C'était la passerelle des Bruzolles.
Les allemands enterraient des conteneurs dans le près à
monsieur DOUCERON pour se mettre dedans.
A Pruniers, il existait deux tranchées faisant fonction d'abris
aériens. Une tranchée était située devant la salle des
fêtes, sur le près du père MESTRE dont la ferme était située
à l'emplacement actuel de la pharmacie. L'autre tranchée était
sur la route de Lassay, actuellement rue Victor Hugo, face à
l'ancienne école des filles, maintenant à la place du centre de
loisirs. A l'époque, c'était parmi les vignes.
La forme de ces tranchées était en zig-zag afin de ne pas subir
l'effet de souffle ou l'onde de choc des bombes. Effet de choc
qui serait mortel dans une tranchée rectiligne. Malgré ces
aménagements anti-aérien pouvant recevoir 25 à 30 personnes,
beaucoup de prunellois préféraient aller se réfugier dans les
bois, loin des maisons. L'approche des avions bombardiers alliers
était annoncée par la sirène du camp de Pruniers. Etant donné
que tout le matériel de la base avait été caché dans le bois
des Thivault, on peut dire que la base ne servait qu'à
l'emission de cette sirène.
Bombardements
1940-1944
Il
faut d'abord dire qu'avant l'occupation, la base et Romorantin (notamment
la gare) ont été mitraillés par des
avions italiens.
L'US AIR FORCE était équipée de forteresses volantes B17
quadrimoteurs et de LIBERATORS B24 quadrimoteurs.
La ROYAL AIR FORCE était équipée de STERLING quadrimoteur et
du fameux LANCASTER quadrimoteurs et ALIFAX quadrimoteurs.
A cette époque, le gros des bombardements de jour était
réalisé par l'US AIR FORCE et la nuit par la ROYAL AIR FORCE.
Les bombardements de Pruniers en 1944 sont relatés dans le livre
"Quand les alliés bombardaient la France", editions
PERRIN, 1997 : le 10 avril 1944, de 9h55 à 11h05, 49 LIBERATORS
B24 avec chasseurs bombardaient le camp ; le 30 avril 1944 à
12h15, 12 chasseurs THUNDERBOLT américains bombardaient le camp
; le 4 juin 1944, 72 B24 LIBERATORS bombardaient le camp. Des
avions en bois servaient de leurre aux attaques aériennes.
C'est le lundi de Pâques 44 que les Anglais sont venus bombarder
le camp alors qu'une école d'aviation allemande de pilotes de
chasse faisait ses exercices journaliers... Cette école était
arrivée la veille des Rameaux. Tous les jours ils survolaient
Pruniers avec un bruit assourdissant, continuel et donc
insuportable du lever au coucher du soleil. Le jour de l'attaque
anglaise, les Allemands, au sol, envoyèrent des fusées rouges
pour prévenir les avions qui n'avaient pas encore aperçu les
aliés.
Lucien BOULEAU se souvient que les forteresses volantes
américaines bombardaient à haute altitude, donc peu de bombes
tombaient sur le camp. Lucien BOULEAU se souvient des bombes
tombées autour de l'Abbaye, bombes dont la projection de marne (de
l'argile et du calcaire) traversa la
toiture pour finir sur la table de nuit de son grand-père. Plus
dur que la marne : les morceaux de rails tombaient du ciel...
Jean-Marie Bisson se souvient que son père, Daniel, avait fait
le voeu de refaire les vitraux de l'église de Pruniers (qui
avaient été détruits par les bombardements),
si son moulin résistait. Après la libération, le voeu fut
réalisé et les vitraux furent mis en place par les Ateliers
GOUFFAULT d'Orléans. Comme il est d'usage, le mècène d'un
vitrail laisse une signature personnelle figurative. Ainsi, dans
le coeur, de part et d'autre de la Vierge, figurent les Saints
patrons des deux fils de Daniel BISSON : Saint-Jean Baptiste,
également Saint Patron de l'église et Saint-jacques.
Des postes de D.C.A. étaient placés à côté de la Philipière
où les emplacements sont encore visibles.
La photographie du culot de bombe ci-dessous a été récupéré
par Lucien CARRE en bas de la Nigaudière, dans un pré. Une
douzaine de bombes y sont tombées.
Les commentaires ci-dessous, sont extrait du bulletin spécial"Romorantin sous l'occupation"de la Société d'Art, d'Histoire et d'Archéologie de Sologne 14, rue de la Résistance 41200 Romorantin Tel : 02 54 76 22 06
Bombardement du
camp de Pruniers, 25 mai 1940
Monsieur
Roland AUGER relate dans son livre "Journal de guerre d'un
non combattant" (éditions Le
Clairmirouère du temps, 1992) le
bombardement du camp de Pruniers le 25 mai 1940 vers 16h par 18
bombardiers allemands. Des Stukas auraient causé des dégats
très importants aux hangars et installations. 152 bombes furent
lâchées et huit soldats français, servants à la D.C.A. furent
tués. Le soir même, un bombardier allemand revint larguer huit
bombes sur la base. Ces destructions expliquent à elles-seules
les pesantes réquisitions allemandes d'ouvriers du bâtiment en
juillet 1940 pour remettre le site opérationnel.
Bombardiers allemands et Stukas |
Bombardement du
camp de Pruniers le 15 juin 1940
Monsieur
Roland AUGER précise dans son livre, "Journal de guerre
d'un non combattant" (éditions Le
Clairmirouère du temps, 1992), que 17
bombardiers ont encore occasionné des dégâts importants aux
installations de la base vers 13h. Il n'y eut pas de victimes.
L'effet de surprise n'a pas joué comme la première fois car une
partie du matériel avait été évacuée. La D.C.A. avait reçu
du renfort et des chasseurs de la base, une patrouille polonaise
équipée de Morannes 406 avait eu le temps de prendre l'air.
Quatre appareils ennemis furent abattus, un par la D.C.A. et
trois par la chasse. Les journaux locaux ne paraissant plus, nous
n'avons aucun autre témoignage sur ces deux bombardements du
camp de Pruniers. Or, un document retrouvé dans les archives
municipales ne concorde pas avec les souvenirs de Roland Auger.
Sur une liste de ictimes militaires inhumées à Romorantin,
figurent la date et le lieu de décès. Le 5 juin 1940, 12
militaires seraient décédés à Pruniers : Melchior CHORLET,
Roger FOURRIER, Jacques GUYON, André JACOB, Emile KEMPF, Roger
MARDON, André MIKKES, Bernard MOISAN, Anatole NEGRERIE, Jean
PERALES, Robert POUX et Joseph RUDO. Deux autres le lendemain :
Albert BAUZON et René DALHEIM.
Moranne 406 polonais |
Bombardement du
camp de Pruniers le 10 avril 1944
Pendant
l'alerte déclenchée de 9h55 à 11h05, le camp de Pruniers a
été successivement mitraillé et bombardé par l'aviation
anglaise. Chasseurs et bombardiers, en très grand nombre, sont
passés au-dessus de Romorantin (source :
archives départementales du Loir-et-Cher).
Le 11 avril 1944, le maire de Romorantin adresse un rapport au
préfet : "Le camp de Pruniers a été touché par des
bombes incendiaires et explosives lancées par une formation
d'une cinquantaine d'appareils à deux reprises. Sur l'ordre des
autorités allemandes, les sapeurs pompiers de Romorantin se sont
transportés au camp de Pruniers afin de prêter leur concours au
service de secours. Le second bombardement s'étant produit alors
que les pompiers se trouvaient sur place, je me suis rendu
moi-même sur les lieux. J'ai pu constater ainsi la bravoure et
le sang froid de nos jeunes et vaillants sapeurs qui, sous les
ordres du capitaine Cuisinier et du lieutenant Huet, ont eu une
conduite exemplaire. Nous n'avons pas à déplorer de victimes
civiles, même parmi les ouvriers des entreprises travaillant
pour l'autorité allemande. Les réservoirs à alcools se
trouvant sur le territoire de la commune de Gièvres ont été
incendiés."
Près l'attaque, le préfet adresse ses félicitations pour
bravoure et sang froid aux sapeurs pompiers sous les ordres de
Cuisinier et Huet. Le 20 avril 1944, la Feldkommandantur de Blois
exprime sa reconnaissance pour l'intervention énergique et
courageuse des sapeurs-pompiers qui ont pris une part active aux
travaux d'extinction de l'incendie au moment du bombardement.
Bombardement du
camp de Pruniers le 30 avril 1944
Vers
12h15, (source : archives départementales
du Loir-et-Cher), des avions de chasse ont
survolé le camp de Pruniers. Des bombes ont été lancées. Le
commissaire s'est rendu sur les lieux à la fin de l'alerte avec
l'adjudant de gendarmerie. Sept bombes explosives ont été
lancées sur le camp. Une bombe est tombée sur le bord de la
route, à l'entrée du camp (baraquement à
droite de l'entrée du camp), une autre est
tombée à 550 m plus loin sur le milieu de la route de
Romorantin à Selles. Tous les fils téléphoniques et
électriques ont été coupés.
Bombardement du
camp de Pruniers et du camp des Landes le 4 juin 1944
Le
commissaire envoie un long rapport au sous-préfet, dès le
lendemain, sur ce tragique bombardement (source
: archives départementales du Loir-et-Cher)
: "J'ai l'honneur de vous rendre compte qu'au cours de
l'alerte qui a duré le 4 juin courant de 19h33 à 21h04, de
nombreuses escadrilles d'avions anglo-américains ont survolé la
ville de Romorantin et ont lancé des fusées. Quelques instants
plus tard, un bombardement assez intense était perçu au
sud-ouest de Romorantin dans la direction de Pruniers et du camp
des Landes. Suivant vos instructions et dès la fin de l'alerte,
nous nous sommes portés sur les lieux et avons constaté qu' à
environ deux kilomètres de Villefranche, au bord de la route qui
va de Villefranche à Selles, au lieu-dit Sainte Marthe, de
nombreux points de chute ont été relevés. Une auberge située
à droite de la route et tenue par M. Berthau Clotaire a été
complètement détruite. Parmi les occupants, on compte quatorze
morts (dix hommes, trois femmes et une jeune
fille) et sept blessés. Une section de
gardes mobiles cantonnés à Villefranche assure le déblaiement
et le transport des morts. A proximité du camp des Landes, la
route est coupée en deux endroits par des bombes de fort calibre
sur une longueur d'environ dix mètres. Autour de ces points de
chute, de nombreux incendies se sont déclarés dans les bois de
sapins situés au bord de la route et prennent une dangereuse
extension. Plus loin, toute la partie du camp et des Landes est
en flammes. Cependant, le silo, le château d'eau et les hangars
environnants ne sont presque pas touchés. Près de la gare de
Pruniers, au lieu dit Les Quatre Roues, plusieurs bombes sont
tombées creusant des entonnoirs sur la route. Un mort et trois
blessés ont été transportés de cet endroit à l'hôpital de
Romorantin. Le bourg de Pruniers n'a subi aucun dommage. Par
contre, les hangars métalliques du camp de Pruniers ayant
échappé à la destruction des derniers bombardements ont été
entièrement détruits. Il est à remarquer que, tant à Pruniers
qu'au camp des Landes, des bombes incendiaires et explosives ont
été employées. On peut évaluer à quatre cent environ le
nombre de points de chute. Aujourd'hui en fin de matinée, nous
avons été avisés que les incendies des bois mentionnés plus
haut ont été circonscrits à 5 heures.
La liste des morts s'établit ainsi :
Lieu-dit Sainte Marthe, BERTHAU Clotaire, TOYER Gaétan, GIRAUDIN
Marcel, BERTRAND Louis, DESSIAUME Anselme, VILLAIN Abel, GAEDA
Gracia (sujet espagnol),
SOURIOUX Abel, BERTHAU Clotilde née Sarton, FAISANT Dupont,
MASCET Charlotte née Mer, Madmemoiselle MASCET Pierrette.
Dans un bois de pins face au camp, le corps de Monsieur René
LACHIESA a été retrouvé décapité. Pruniers, Monsieur BARDOUX
Camille (père de dix enfants).
On compte en outre à Saint-Marthe sept blessés et trois à
Pruniers. Au cours de la nuit du 4 au 5 juin, trois personnes
hospitalisées à Romorantin ont succombé à leurs blessures, à
savoir Madame veuve BERTHAU et Monsieur BLAISE. Tous deux ont
été blessés au bombardement de Sainte-Marthe. Madame SAULAT,
chef de gare à Pruniers, a été blessée au cours du
bombardement et qui succomba à ses blessures.
Les
distractions sous l'occupation
L'occupant
interdisait tout rassemblement et imposait un couvre feu à 21h.
Malgré tout, la jeunesse organisa des bals clandestins dans les
écarts, à Saugirard en particulier. Exceptionnellement, il y
avait des rassemblements dans le bourg, ce qui était dangereux.
Les gendarmes allemands faisaient des rondes en vélo et
veillaient... Ils faisaient peur avec leur "colier à
vache" autour du coup. Il est arrivé qu'avant la venue
d'une patrouille qui, heureusement, avait été signalée, que
les jeunes soient obligés de se quitter précipitamment en
passant par les fenêtres. Être pris entraînait de gros
risques. Il était d'usage de se cacher dans les herbes au
moindre bruit de bottes. Un enfant prunellois, qui s'était
attardé à ses travaux de la journée, reçu des coups de botte
dans le derrière alors qu'il tirait du foin après 21 heures. A
la maison il fallait soit éteindre les lumières (à
cause des bombardements), soit mettre des
cartons aux fenêtres.
A la Garde, sur la commune de Gy, il fut aménagé pour danser un
parquet dans une grange. Le propriétaire était monsieur GAUGRY.
Avant de quitter les lieux, on mangeait la fromagée puis on
cachait le parquet sous une couche de foin. Et pour danser, par
exemple sur l'air de "La rue de notre amour", il
fallait naturellement des musiciens !
C'est
ainsi que fut créé la formation "Le Marinette Jazz".
Il était d'usage de mettre un bérét par terre pour recevoir
des pièces.
La formation a joué au bénéfice des prisonniers à la Ferté
Imbault avec Madeleine SOLOGNE, à Blois au théâtre municipal
et pour les prisonniers, pour, avec les bénéfices, envoyer des
colis. Les membres de cette formation apprenaient la musique au
grand jour avec leur professeur monsieur RYNINE qui venait 2 fois
par semaine à Pruniers acec Jean SAUGER. Les allemands ne
voyaient que des cours de musique. Ce qu'ils ne savaient pas
c'est que, certaines nuits, ces musiciens jouaient
clandestinement.
Le
Marinette Jazz
Les seuls concerts officiels étaient joués par l'orchestre militaire allemand, sur la place de l'église, sous les tilleuls. Les soldats allemands, quant à eux, faisaient la fête à "La Grenouillère".
Partitions d'époque qui étaient jouées par le Marinette Jazz
Les
rationnements
Il y
avait des rationnements pour la nourriture, les vêtements, les
chaussures... Il fallait retirer les tickets à la mairie. Il
vous était attribué contre ces tickets une ration de pain ou de
viande, ou de sucre... Les portions étaient légères... Les
prunellois allaient chercher un petit plus dans les fermes.
Parfois ils passaient le Cher pour aller chercher, en zone libre,
de l'huile, du savon ou des vêtements. Les portions étaient
établies en fonction de l'âge ou de la pénibilité de son
travail. Les catégories étaient J1, J2, J3 ou travailleur de
force. Les commerçants devaient tenir un registre détaillé
concernant les distributions des denrées. Voici le livre de
Germain CARRE, charcutier à Pruniers, qui allait
s'approvisionner en matière première à l'Octroi de Romorantin
contrôlé par les allemands et qui était tenu par monsieur
PION. L'octroi était un abattoir et une réserve de vivres.
L'octroi existait avant la guerre, les fermiers prunellois y
fournissaient leur quota de beurre.
Les
colis aux prisonniers
A
l'école des filles, on se réunissait avec mademoiselle CLEMENT,
institutrice, et les deux instituteurs SIMON pour confectionner
des colis aux prisonniers. Le prisonnier filleul de la commune
était monsieur VIOLETTE. Le retour des prisonniers se fêta
dignement, une fois que tout le monde fut rentré au village.
Parachutages
Il y
avait des parachutages pour les membres de la résistance à la
Flandrinière. Les résistants de Pruniers allaient chercher les
caisses d'armes et les camouflaient dans des bottes de paille.
Les caisses contenaient aussi des pioches démontées. On les
apportait à la ferme de Chêne Moreau, quartier général d'une
fraction de la résistance. Cette ferme était à 500 m du
château de Chêne Moreau, château qui habritait de hauts
gradés allemands.
Pruniers
détruit ?
Une
colonne allemande avait été annoncée par les réseaux de la
résistance. Deux résistants se sont donc postés, avec un fusil
mitrailleur, devant l'emplacement actuel de la salle des fêtes
et dans le pré de monsieur CARRE. Heureusement, la colonne n'est
jamais passée... Pruniers aurait sûrement été détruit par la
bataille.
André
MORAND
André
MORAND était un jeune résistant, il a été fusillé aux
lieu-dit "Les Quatre Roues" le 13 août 1944.
Voici
ci-après ce qu'écrivait la Nouvelle République du lundi 4
août 1947 :
Malgré le soleil accablant, malgré la
période des vacances, une foule nombreuse et émue a assisté
hier à Pruniers à l'inauguration du monument élevé à la
mémoire du jeune F.F.I. André MORAND. André MORAND, qui avait
pris le maquis avec son père et son frère pendant que sa mère
était déportée en Allemagne, a été fusillé dans la commune
même où il était né 19 ans plus tôt. Grâce à la
générosité de la Résistance, de la municipalité et de la
population de Pruniers, un monument a été érigé à l'endroit
où le jeune héro paya de sa vie son courage et son patriotisme.
Un défilé, parti du moulin des Quatre Roues, se rendit au
monument érigé tout près, pendant que retentissait "Le
Chant des Partisans" diffusé par des hauts parleurs. Les
pompiers et la clique ouvraient la marche suivis des porteurs de
nombreuses et magnifiques gerbes, de la section F.F.I., des
personnalités parmi lesquelles MM LOUSTAU député, MAUGER
président du C.D.L., MILOT conseiller général et maire de
Contres, Théo BERTHIN et CANTEREAU membres du C.D.L., le docteur
BREITMAN conseiller général de Romorantin, SAUZIER président
départemental de la F.N.D.I.R.P., CARTIER adjoint au maire de
Blois et directeur départemental de l'Office des Combattants,
CHARBONNIER chef de la division de la préfecture, HAÏ chef de
cabinet à la sous-préfecture de Romorantin,Daniel BISSON maire
de Pruniers accompagné de son conseil municipal, CHARLOT
directeur départemental à la population, le commandant
BOURGOIN, MM AUDEBERT et le Docteur CHRETIEN adjoints au maire de
Romorantin, de nombreux maires de communes environnantes, le
capitaine CUISINIER, l'adjudant-chef de gendarmerie FOURDACHON et
l'adjudant LABUSSIERE, etc... Venaient ensuite la famille du
jeune MORAND, des délégués des déportés, de résistants, des
anciens combattants et des prisonniers de guerre et enfin de la
foule. Une importante délégation du conseil municipal de
Contres et de nombreux amis controis assistaient également à la
cérémonie. Les drapaux des F.T.P.F. de Romorantin, du corps
franc VALIN de la VAYSSIERE, de la F.N.D.I.R.P., de l'amicale des
Résistants de Romorantin, des anciens combattants et des
prisonniers de guerre de Pruniers, cravatés de crêpe,
précédaient les délégations. Le lieutenant LEGRAND, chef de
la Résistance de Pruniers, dévoila le monument et demanda une
minute de silence. Monsieur BISSON, maire de Pruniers, prononça
alors un discours. Après le dépôt des gerbes, un clairon sonna
"Aux morts" et la foule émue écouta ensuite "La
Marseillaise". Puis le cortège se reforma pour se disloquer
dans la cour du moulin où la foule présenta ses condoléances
à la famille du jeune martyr. Enfin, une réception eut lieu
dans la salle des fêtes de Pruniers au cours de laquelle
Monsieur BISSON renouvela à la famille MORAND l'expression des
condoléances de toute la population de Pruniers, puis, en
quelques mots, Monsieur Robert MAUGER remercia la municipalité
de Pruniers, son maire et la population, de la réalisation de
cette cérémonie à la mémoire de son jeune camarade.
Voici
ci-après ce qu'écrivait la Nouvelle République du mercredi 6
août 1947 :
Nous
avons rendu compte, dans notre édition de lundi, de la
cérémonie qui s'est déroulée à Pruniers dimanche dernier à
l'occasion de l'inauguration du monument élevé à la mémoire
du jeune André Morand, fusillé par les Allemands à la veille
de la libération. A la demande de la famille, un seul discours a
été prononcé devant le monument par Monsieur Daniel Bisson,
maire de Pruniers. Monsieur Bisson a rappelé qu'un camion était
tombé en panne le 13 août 1944 aux "Quatre Roues",
transportant un jeune homme héro des F.F.I. Il se fait un devoir
sacré de remémorer, devant le monument glorieux, le magnifique
exemple que le splendide sacrifice de ce vaillant jeune homme qui
a donné sa vie pour la France et que ses bourreaux ont
martyrisé et fusillé sur cette commune de Pruniers.
"Pleurant le disparu, notre pensée reconnaissante et émue
évoque le souvenir de ce jeune homme dont l'exemple est celui du
devoir sublime et silencieux : mourir obscurément dans une
gloire collective et mourir pour son pays. " Monsieur Bisson
a ensuite évoqué toutes les phases du drame vécu par la
famille MORAND, traquée par la Gestapo. "Le père quitte
Contres - où il vivait depuis 11 ans le 25 mars 1943. André
s'enfuit le 2 août. Sa mère est arrêtée et déportée en
Allemagne le 17 août. Retrouvant son père et son frère dans le
maquis, André est volontaire. Il se voit confier une mission
périlleuse et le 12 août 1944, à 8h du soir à Meusnes, il est
arrêté, chargé dans un camion qui l'amène aux "Quatre
Roues". Il est descendu violemment pour être fusillé et
jeté dans un trou, abandonné sans possibilité d'identification
immédiate. Grâce au dévouement de Messieurs Alexandre SIMON,
Paul DOUCERON, Georges MARADENES et Robert BLONDEAU, son corps
fut transporté, malgré les graves difficultés existant à
l'époque, au bourg de Pruniers où une cérémonie fut
organisée et suivie d'une assistance sympathique. Voilà ce que
ce monument doublement sacré nous rappelle, ce qu'il dira aux
générations qui montent, afin qu'elles ne laissent pas
s'éteindre la flamme patriotique et française qui animait notre
jeune compatriote de 19 ans. "
Après avoir rappelé que la France lui a justement décerné la
"Croix de Guerre", Monsieur Bisson a conclu en
soulignant le symbole de ce monument et en demandant à la foule
de s'incliner profondément devant, avant de se séparer.
Voici
ci-après ce qu'écrivait Gilbert RIGOLLET dans une lettre à la
Nouvelle République le 6 mars 2006 :
"J'ai
été très ému par le rappel de la nuit tragique du 11 août
1944. L'identification du jeune résistant torturé à mort a
été facile pour moi puisqu'il s'agissait d'un camarade de la
"Section de Contres" des F.F.I. à laquelle
j'appartenais moi même, ainsi que son père René et son frère
Jasmin. Sa maman, Juliette a été déportée en Allemagne.
André MORAND -notre petit "Dédé"- avait été
envoyé en mission sur les bords du Cher. A un carrefour, il
croisait un détachement allemand. On connaît la suite tragique.
Notre section avait été placée sous le commandement du
lieutenant Louis LE PALLEC. Elle avait reçu l'ordre de s'emparer
des locaux de la Milice à Blois, et des miliciens pouvant s'y
trouver, André devait nous y rejoindre. C'est là que nous avons
appris le drame. Il nous était interdit d'en parler à son père
et à son frère. Malgré ses horribles souffrances, André n'a
pas parlé sous les tortures. S'il l'avait fait, quel sort aurait
été le nôtre ? Nous étions une cinquantaine dans l'immeuble
de la Place de la République.
La
reddition de la colonne Elster le 15 septembre 1944
Entre avril et septembre 1944, le général de division Botho Henning Elster dirige la Feldkommandantur de Marseille puis de Biarritz. Lors du repli, Elster est chargé, à sa grande surprise, de commander une arrière-garde de 25 000 hommes. Tout en remontant vers le nord, il prend secrètement contact avec la Résistance puis avec les Américains, pour préparer sa capitulation. Convaincu de la défaite imminente de son pays, Elster estime qu'il faudrait arrêter les hostilités et épagner la vie des soldats. Mais il ne veut se rendre qu'à une unité militaire régulière. Ce sera chose faite le 14 septembre 1944 à Beaucency, sur la Loire, où la 822ème Military Police Company américainne entérine sa reddition. Il se rend aux américains à Pruniers, au Château de Chêne Moreau, château dont on reconnait les arcades sur cette photographie ci-dessous. |
Jusqu'en février 1947, Elster sera donc prisonnier de guerre, d'abord des Américains puis des Anglais. Pendant sa captivité, il a dû essuyer les insultes de nombreux codétenus allemands, pour lesquels il est un traître. Quelques semaines avant la capitulation de l'Allemagne nazie, il sera d'ailleurs condamné à mort par la Volksgerichthof pour avoir transgressé les ordres de ses supérieurs.
La
libération
Devant
l'arrivée des forces de libération, l'occupant commença à
faire mouvement vers l'Allemagne. Les résistants harcelèrent
ces troupes en replis qui ripostèrent en prenant des otages, en
tuant des maquisards... Sur la commune de Pruniers, deux
monuments sont érigés en l'honneur des résistants tués par
l'occupant. A la Flandrinière fut mort au combat, avec d'autres
résistants, Roger CHALAULT de Lanthenay. Les allemands l'avaient
enterré à côté de l'étang. Un monument, au souvenir des
résistants locaux, se dresse à la Flandrinière.
Il y eut un attentat ou une rébellion à la base. Les allemands
ont réuni des gens de Pruniers en représaille devant l'église.
Le maire de l'époque, monsieur SARTON, et son adjoint ont dit
que s'il fallait tuer quelqu'un c'était eux. La représaille n'a
pas eu de suite connue...
Le 22 août 1944, monsieur Alphonse ROBIN, en passant dans le
quartier du Bourgeau à Romorantin alors qu'il allait prendre son
service au commissariat, aperçu un incendie dans une maison. Cet
incendie avait été allumé par des allemands. Il s'empressa de
l'éteindre mais il fut arrêté avec deux autres romorantinais.
Ils furent emmenés par les allemands à la Brigaudière, commune
de Pruniers, où ils furent fusillés.
Le mois de septembre 1944 a vu les derniers allemands libres à
Pruniers.
Après cette date, des prisonniers allemands ont été employés
à la Philipière et à la Barrilière comme ouvriers agricoles
afin de palier au manque de main d'oeuvre.
Après
la guerre
La
liberté retrouvée, le calme est revenu. Pour fêter la
victoire, les prunellois dansèrent durant trois jours autour du
monument aux morts. Certains usèrent les semelles en bois de
leurs chaussures ! Pierre GERMAIN se souvient avoir aidé Roger
LAMBERT, menuisier et organiste, à sonner le toscin en tapant
sur la cloche de l'église.
La reprise du travail fut difficile : les paysans manquaient
d'outil et d'animaux de labeur. Le travail dans les champs se
faisait pratiquement à la main. Les cultivateurs allaient vendre
leurs productions davant la halle de Romorantin, pas à
l'intérieur car celle-ci fut incendiée par les allemands en
1944. Sur Pruniers, on comptait au moins 80 paysans.
Puis la vie reprit son rythme et, chaque année, les cirques
venaient s'installer devant le puit du Pâtureau du Grand
Village...